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Comme moi, vous avez peut-être des ancêtres meuniers mais vous ignorez où chercher, voici donc les différents documents que vous pourriez trouver afin de pouvoir retracer au mieux leur histoire.

Recherches aux Archives Départementales

C’est aux Archives Départementales que vous effectuerez vos recherches, en sachant que les archives sont classées en séries anciennes, avant 1790, de A à I, et en séries modernes, postérieures à 1790, de K à Z.

Sous l’ancien régime, un moulin appartenait le plus souvent à un fief, à une abbaye ou toute autre juridiction. Les réglementations coutumières ou royales sont nombreuses, qu’il s’agisse de l’usage des cours d’eau ou de l’établissement proprement dit de moulins. Il n’y a pas de sources d’archives judiciaires, seigneuriales ou notariales qui n’en fassent mention. Pour la période de l’Ancien Régime consulter les séries B, C, E, 4E, G ou H et J. Ces dépouillements vous donneront les premières citations médiévales, s’il y en a, de votre moulin et vous permettront de cheminer, de baux en baux, d’actes en actes, jusqu’à la veille de la Révolution de 1789.

Le décret des 13-18 novembre 1789 avait prescrit à tous les établissements ecclésiastiques de faire la déclaration de leurs biens ; des moulins figurent sur ces listes. Des procès-verbaux d’estimation sont dressés pour la vente avec inventaire, baux passés et divers documents permettant l’estimation du bien. Ne pas oublier de consulter ensuite “les décomptes de règlement” afin de savoir comment la vente du moulin s’est trouvée soldée, ce qui réserve souvent des surprises. Le décret du 8 avril 1793, relatif à la vente des biens des émigrés, dits de seconde origine, a mis en place une procédure d’enquêtes et expertises afin de vérifier « que leur conservation ne cause aucun dommage aux propriétés environnantes ». Les procès-verbaux des experts sont riches de renseignements sur l’état des bâtiments, du matériel et capacité de production. Aux Archives départementales, consulter la série L et Q – Biens nationaux.

Localiser le moulin

La consultation des cartes anciennes attestera de l’existence de votre moulin à la date où celle-ci a été imprimée. Que votre moulin soit porté de façon non équivoque sur la carte dite de Cassini à l’échelle d’environ 1/86400e, la seule carte de France pour le XVIIIe siècle, devrait suffire à attester que votre moulin « est fondé en titre ».

Dressée entre 1831 et 1881, la carte dite d’Etat-major est à l’échelle 1/86000e ; les cartes cantonales sont des alentours de 1870, ne pas oublier non plus la carte IGN actuelle au 1/25000e.

Mis à part certains plans terriers de l’Ancien Régime ou autres plans retrouvés dans des dossiers de procédure judiciaire à l’occasion de divers litiges, ou des plans dressés lors d’enquêtes relatives au règlement d’eau, le seul moyen de bien situer le moulin est de recourir aux documents fonciers fiscaux. La Révolution a institué un nouveau système fiscal. La loi du 15-25 sept 1807 va organiser le Cadastre, mais les relevés ne seront effectifs que dans les années 1820. Aux Archives départementales, les plans et matrices cadastrales sont en série P. Pour des relevés récents, consulter le service du cadastre directement. Vous constaterez combien le site a évolué en 150 ou 200 ans.

 

L’activité des moulins

De tous temps, les moulins ont été placés sous la surveillance de ceux qui détiennent la puissance publique, Roi et seigneurs sous l’Ancien Régime, Administration à partir de la Révolution. Il s’agit avant tout de s’assurer de leur bon état de fonctionnement afin de ne pas causer de dommages au voisinage, prenant en compte le caractère insalubre, ou risquant de l’être, des usines.

Police des cours d’eau et des établissements insalubres : C’est le Code rural (Décret des 28 sept. – 6 oct. 1791) qui énonce le principe du contrôle. Les propriétaires ou fermiers des moulins et usines construits ou à construire seront garants de tous dommages que les eaux pourraient causer aux chemins et aux propriétés voisines. L’Assemblée Nationale par le décret des 21 sept. – 13 nov. 1791 a maintenu les anciens règlements de police relatifs à l’établissement ou l’interdiction, dans les villes, des usines, ateliers ou fabriques qui peuvent nuire à la sûreté et à la salubrité de la ville.

Le décret du 15 octobre 1810 établit un classement des usines qui répandent une odeur insalubre et incommode en 3 catégories dans lesquelles ne figuraient pas les moulins initialement. Une ordonnance du 14 janv. – 15 fév. 1815 introduisit les moulins à huile dans la 3e classe, c’est-à-dire celle des “établissements et ateliers qui peuvent rester sans inconvénient auprès des habitations particulières, mais pour lesquels il sera nécessaire de se munir d’une permission“. L’ordonnance du 9 fév. – 1er mars 1825 rangea les moulins à farine des villes, les moulins à broyer le plâtre, la chaux et les cailloux dans la 2e classe, c’est-à-dire celle dans laquelle l’éloignement des habitations n’est pas rigoureusement nécessaire, mais qui doivent obtenir l’autorisation du préfet. Tous les établissements vont faire l’objet d’enquêtes et être autorisés à fonctionner par un règlement d’eau. Ces dossiers sont riches en procès-verbaux détaillés des installations, accompagnés de plans levés par les ingénieurs du Service hydraulique. Aux Archives départementales, consulter la série S.

 

Les moulins, entreprises familiales et industrielles

Les moulins ont été le siège d’une activité économique fondamentale au sein de l’économie rurale et leur fonctionnement a constitué souvent l’élément essentiel d’une communauté villageoise. Il est important de s’attacher à l’étude des structures de l’entreprise (taille et équipement), et ensuite d’en suivre l’évolution.
Ce sont les documents fiscaux, en premier les matrices des rôles de patente, qui sont les plus aptes à nous renseigner sur l’état technique des installations. La loi du 2 – 17 mars 1791 est réorganisée à différentes reprises au cours du XIXe siècle (en particulier par la loi du 25 avril 1844) ; la contribution des patentes est composée d’un droit fixe, fonction du nombre des ouvriers mais aussi du nombre des meules et des cylindres (avec réduction de moitié du droit pour les usines qui chôment par manque ou crue d’eau pendant 4 mois au moins dans l’année), et d’un droit proportionnel portant sur la valeur locative des locaux et emplacements (en général fixé au 1/20e). Grâce aux indications enregistrées sur ces carnets, sont perceptibles les différentes évolutions techniques et la coexistence des générations de machines en tout genre, ainsi d’ailleurs que l’éventail des activités complémentaires de tels sites (moulins à battre le tan et à broyer le trèfle, matériel agricole et scierie, etc….). Ainsi, par l’énumération du matériel et par la liste des exploitants, c’est toute la stratégie de l’entreprise qui se dévoile. Aux Archives départementales, ces informations se trouvent dans la série P.

Les enquêtes statistiques vont également fournir des indications sur les équipements et sur les usiniers, propriétaires et exploitants au cours du XIXe siècle.
Enquête dite de l’An II : Elle a été menée pour des raisons d’approvisionnement civil et militaire. Un certain nombre de mesures furent prises pour interdire aux meuniers tout commerce de grains et farines et imposer des déclarations pour soumettre “tous les meuniers à la réquisition du Ministère de l’Intérieur ”. Les conditions de mouture sont réglementées par une Instruction sur la mouture dite nationale, décrets du 15 novembre 1796 et 18 Frimaire An III. L’enquête dite de l’An II, ou « statistique industrielle des districts », demandée en messidor An II (juillet 1794), a été menée auprès des municipalités. Le formulaire était sommaire mais néanmoins des remarques vont pouvoir y figurer portant soit sur l’état des bâtiments ou des mécaniques ainsi que sur les périodes d’activité ou d’inactivité. Aux Archives départementales, les résultats de cette enquête se trouve dans la série L.

Enquête de 1809 sur les moulins à farine : Une série de circulaires de fructidor An V (août 1797) à Germinal An VII (avril 1799) préconise des enquêtes partielles dont une partie va alimenter la Statistique des Préfets après 1800. Une circulaire du 31 décembre 1808 adressée par le Bureau des Subsistances au Préfet des départements aboutit à l’établissement d’un état complet des moulins à farine dans chaque canton. Le formulaire fournit une description détaillée : genre de moulin, à eau ou à vent ; équipement : roue perpendiculaire ou horizontale (rare) ; nombre de tournants ; provenance des meules, lieux d’extraction ; qualité des moutures “à la grosse” ou à la lyonnaise, la plus répandue, ou à la parisienne qui commence à se répandre dans les villes à partir des années 1780 ; capacité de production ; produit annuel possible et non réel ; poids des farines produites par jour ; observations sur l’état du moulin ; périodes de chômage, le temps et les causes, sècheresse, gelées, inondations, manque de vent.
Les enquêtes statistiques des années 1850-1860 répondent à des renseignements plus diversifiés comme activité : à farine, à fèves, à huile, à plâtre ; nombre de paires de meules ou de cylindres ainsi que leur type ; nombre d’ouvriers employés, production et appréciation sur l’évolution récente (augmentation, baisse) ; situation économique générale, mévente, concurrence.

Enquêtes de la seconde moitié du XIXe siècle : Le décret du 1er juillet 1852 a créé les Commissions cantonales de statistiques qui fournissent des tableaux annuels sur les faits statistiques dont il importe que le Gouvernement ait connaissance… Une lettre du Ministre de l’Agriculture du 25 mars 1861 précise que les meuniers doivent être recensés comme les minotiers. La meunerie est une des industries les plus considérables du pays. L’opération a été rigoureusement menée mais un tel effort de collectes de données ne va pas se poursuivre sous la IIIe République, où l’on ne dispose souvent que de quelques séries annuelles entre 1870 et 1880. Aux Archives départementales, consulter la série M, statistiques.
Il ne faudrait pas oublier non plus de replacer les unités de production au sein des branches d’activités auxquelles elles appartiennent et dont les professions vont s’organiser après 1884 au niveau local (Série M – A.D.), comme au niveau national avec l’Association nationale de la Meunerie française et sa publication “La Meunerie française” à partir de 1885, revue riche en études techniques avec citation de modernisation de nombreux moulins. Consulter également les catalogues de constructeurs de matériel de meunerie, lorsque vous le pouvez.

Le Syndicat professionnel de la meunerie et son annuaire édité depuis 1938 peuvent également vous venir en aide. Il existe un responsable syndical dans votre département, renseignez-vous. Ils ont souvent des archives intéressantes à leur siège régional, surtout sur la période des contingentements 1935-1936. Des informations relatives à la cessation d’activité du moulin peuvent également s’y trouver.

Archives de la DDAF et de la DDE

Pour les moulins situés sur des cours d’eau non navigables, non flottables et non domaniaux consulter le Service hydraulique, service des eaux, de la DDAF. Pour les rivières navigables et cours d’eau domaniaux, consulter la DDE Service de la navigation. C’est auprès de ces services que vous trouverez le règlement d’eau de votre moulin, et surtout les modifications ultérieures s’il y a, mais aussi litiges divers sur l’eau et demandes les plus récentes de travaux des usiniers ou des riverains.

Histoire familiale des meuniers

Il reste à envisager les aspects humains en consultant les actes notariés qui permettent de retracer l’histoire de l’exploitation, au moyen des baux et des actes de vente. Il est possible d’en retrouver la trace et la date de passation de l’acte par un dépouillement des tables des baux des registres de l’Enregistrement (Série Q – Enregistrement. – A.D.). A partir de là, il suffira de recourir aux archives notariales déposées aux Archives départementales – série E.

C’est également la masse de toutes les archives liées à l’histoire individuelle et familiale des meuniers qu’il faudra solliciter, qu’il s’agisse de contrats de mariage, de successions, d’inventaires après décès, actes de vente, etc… suivant des méthodes proches de recherches généalogiques, donc pensez à prendre rendez-vous avec le cercle généalogique local pour un échange d’informations. Ceci vous permettra peut-être de découvrir les meuniers de votre moulin depuis le XVIIe siècle…cela est possible. Ce travail de recherches en partant de sources écrites ne peut manquer d’être complété, pour les dernières années d’exploitation, par le recours à l’histoire “orale” et aux “histoires de vie” des derniers meuniers ou de ceux qui les ont connus. Enquêtez autour de vous…

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Source : Fédération Française des Amis des moulins – André Coutard – http://www.moulinsdefrance.org/